Faire Porter des Looks Dadame à des Demoiselles pas toujours en Fleurs

Une fâcheuse manie de la mode qui veut tant faire porter des vêtements de vieilles dames à des filles jeunes, certes, mais pas toujours en fleurs

 

Elles sont fausses, délicieusement fausses ces images.

Ok. Les mannequins ont toujours été préférées jeunes.
Ok. Ça se passe chaque saison, depuis la nuit des temps de la mode.

Okay.

Mais disons qu’à l’époque de Coco Chanel ou Christian Dior,
ces jeunes filles aspiraient justement à être des Dames.
Matures et expérimentées, d’allure et de corps.

Pas forcément mieux.

Aujourd’hui, renversement des valeurs oblige, ce sont ces mêmes Dames qui donneraient tout pour aspirer le collagène des mignonnes, pas toujours au teint de rose.

Alors bon, culte de la jeunesse tout ça-tout ça. Ok.

C’est une explication, pas une excuse. 

A bien y regarder, faire vivre un vêtement sur le corps d’une jeune fille à l’air poupon pour vendre une allure dadame — ça sonne drôlement drôle.
Mais sur image, c’est franchement glauque. 

Reste que l’allure d’une Femme dans des vêtements de Femme,
c’est vachement plus seyant.

 

Une image attire. L’autre atterre.

Et puis à 20 ans, on est pas au summum de sa beauté — preuve par 3. V. Beckham, Céline Dion, C. Ronaldo.

Une Question de Poids

La mode deal des rêves, de l’estime de soi et de l’aspiration sociale…
Elle deal aussi des choses plus terre-à-terre, comme des vêtements. 

Si autant de filles à peine formées sont appelées à habiter des vêtements clairement destinés à leurs aînées…
C’est aussi une question d’argent.

On appelle ça la ‘sample size’, soit la taille de référence, soit celle qui va faire le tour des showrooms et des studios et des rédactions, soit celle qui va avoir le plus d’attention, avec le moindre coût. 

Une taille forcément réduite, parce qu’elle tient du dictat économique.

Monter une collection revient suffisamment chère; on doit bien rogner sur quelques dépenses. De tissus, de préférence. 

La sample size étant, c’est à la femme de s’adapter pour entrer dans cette taille réduite au possible. Et non l’inverse.

L’Homme réduit par sa propre création?
Son corps soumis à ce qu’il a lui-même inventé?

On dira juste Marx, Taylor, Ford. Si vous ne voyez pas de quoi je veux parler, ce n’est pas grave. Mais vous devriez lire plus.

1
3

Un Mirage qui brutalise l’Imagination

Ce n’est assurément pas la seule farce dans la représentation fashion de la femme.

L’écurie fashion a longtemps nié deux de ses pouvoirs extrêmement efficaces. Son pouvoir normatif, et son pouvoir performatif.

C’est assez simple.
Une image, un film, un défilé, ont cette double puissance de présenter une chose comme le modèle désirable. Et de fournir les produits pour l’atteindre.

Une figure, une attitude, un type de cheveux, une couleur de peau, une silhouette à avoir, donc à obtenir. La norme est ainsi posée. Si ce n’est sublimée sur le papier glacé des magazines, figée dans une photo ou à travers l’objectif d’un film.

Et puisque nous sommes des followers programmés de l’idéal…
Processus de sublimation, Freud, Maslow tout-ça tout ça.

Le pouvoir performatif de la mode nous pousse à l’atteindre, cet idéal.
Un idéal bien souvent posé là, partout, devant nos yeux.

Plus fort encore — un processus d’enracinement [ S.Weil, 1949 ] va laisser les femmes s’auto-réguler par ces croyances. Comment?

Par l’obéissance consentie. Ou forcée.
Les moqueries sont souvent un fer de lance bien efficace…

Lancées vers les figures qui ne correspondent pas à ce qui est véhiculé comme beau, sexy, or whatever stupidities — les gros, les cheveux frisés,
les nez de caractère, ou les rides. 

Bref. Ajoutez à cela la volonté de fer de l’Homme pour s’intégrer au groupe.

Faites voir à quelqu’un qu’il n’est pas assez bien pour une chose, il fera tout pour vous prouver le contraire, et acquérir cette chose.

Trick de la vieille Comédie Humaine. 

Alors, faites défiler des fringues de Dames sur des corps de nymphettes — et voilà. 

Le mirage qui intéresse ici est bien celui-ci — faire porter des vêtements de Dame à des demoiselles concourent à perpétuer l’idée que seules les femmes jeunes méritent l’attention. 

Ce procédé marketing est passé dans le patrimoine conventionnel.


Reste que… Qui dit conventionnel, dit tout sauf fashion!

Voilà le truc: copiées et recopiées, ces images de jeunes filles traversent
la mode sans guère satisfaire la moindre imagination.

Le pan de l’industrie qui élève encore le ‘Be Young’ en ambition ultime,
n’est pas loin de tomber sur un os.

Beaucoup de décideuses ne conçoivent plus d’être vues dans les vêtements promus par des gamines de 15 ans.

Le climat imaginaire est en train de changer.

Parce qu’on s’ennuie.
La perfection ennuie.
Le culte de la jeunesse ennuie.
Les normes ennuient.
Le manque d’authenticité ennuie.

Les images de mode, elles-mêmes, provoquent un putain d’ennui.
Un ennui peut-être plus mortel que la vieillesse!