J’aime/J’aime Pas, La Critique Fantasmée

An article written by Doria

Allez, essaie encore…

C’est noir ou blanc. C’est oui ou non. C’est cool ou c’est pas cool. Pour ou contre. Beau ou pas beau.

La capacité critique contemporaine se réduit à peau de chagrin.

 

D’abord il y a ce ‘j’aime’. Expression chargée d’arrière-pensée. Deux mots médiocres qui pourtant portent en eux tout de l’héritage socio-politico-economique de la personne qui ‘aime’.

L’expression est barbare. Certes. La sentence aussi. Surtout lorsqu’on parle d’oeuvres, censément d’art. Car à solliciter constamment l’avis de tout un chacun, tout un chacun se met à rêver d’un avis valable pour tout. Comptant pour tous. 

Tellement vrai que ce ‘j’aime’ se rêve désormais en décideur. Du cool. Du bon. Du beau. Du smart. Du vrai. Comme s’il suffisait d’asséner un ‘j’aime’ pour adouber la chose. 

Ensuite, il y a ce ’j’aime pas’. Le grand absent des médias dit-sociaux. Une absence qui maintient bien éloignée l’esprit critique. 

La négation initie le débat. L’affirmatif consacre.
Voilà tout.

 

Reste que, j’aime ou j’aime pas… L’un comme l’autre réduisent à néant des millénaires de subtilité. On se fiche bien de savoir si tu, elle, nous, vous, ils, elles aiment ou n’aiment pas une toile, un film, une musique — car tu, elle, nous, vous, ils, elles l’assènent comme ça, sans manière. On parle désormais d’art comme on le fait d’un plat d’épinards. 

Ça ressemble à un jugement, mais n’en est rien.

Pourquoi? Car un artiste ne produit pas pour plaire.
Ce qu’il veut, c’est toucher l’instinct, titiller l’émotion,
faire vriller les acquis.

Alors la prochaine fois, soyons coquins:
disons ‘je le sens’ ou ‘je le sens pas’.
Ça sonnera déjà un brin plus adéquat. 

 

Ces variantes ne qui disent tout à fait rien…

 

'Un grand classique.’ ‘C'est bien ça.’ ‘Ça, c'est pas mal’ ‘Ah ouai, celui la il est stylé.’ ‘Oui, Matisse a fait pareil’ ‘Celui-là c’est qui? C'est (x,y, z,)… C’est Paul Klee.‘  ‘Paul Klee ouai’ 
…Ouai…